jeudi 5 janvier 2012

5 janv - Cheap

Dav me regarde faire, lâche un gras: «Gros! T’es pas sérieux?» Quoi, j’suis broke, man. Je fais ce que je veux, je réponds en sortant une cannette de Pepsi de mon manteau, à notre table du Patio Vidal. «Je suis cheap, moi, monsieur!» coule de ma bouche, avec le sourire dehors, la honte de ma vie à l’intérieur. Et j’ai attendu que mon cadran passe de 3h59 à 4h am pour écrire ces lignes, parce que je sais que tu dors tôt, que tu ne liras pas ces lignes. J’en profite pour te dire quelque chose qui ne te plaira probablement pas, dans ton fort intérieur. Je ne t’aime pas. Probably never will. Don’t get me wrong; I like you, but… En fait, c’est probablement mieux ainsi. Je repense à cette petite anecdote, preuve de ma vanité, ma cheapness, en lisant un passage de Simard… C’est fou, que ça me prenne deux semaines avant de lire une seule ligne d’un livre, puis d’en lire une centaine de pages en trois heures, au beau milieu de la nuit… Dans le fond, j’ai peur des auteurs comme lui, des livres comme celui-ci, qui me rappelle à quel point je suis ordinaire, ni petit ni grand, ni laid ni beau, auteur paumé pas trop mauvais, mais qui ne souhaite pas à tout point être publié. Ma seule ambition, pour le moment, c’est de transformer ma job en métier. Être libraire. Et ça ne me dérange pas de ne pas t’imaginer classer les livres à mes côtés. Tant que tu me laisses un message aux deux jours, le monde peut s’écraser dans sa fin du monde, ça m’est bien égal. Je suis cheap au point de sauver le plus de mots quand on se retrouve face à face, ou juste à jaser en direct, afin de les classer, les réajuster, jouer avec, et les empiler dans des paragraphes fleuves. Et en général, je n’ai plus les mots, devant toi. I just don’t care about them, they’re just too much, I don’t need them. Mais ne prends pas ça pour de l’amour. Je n’ai plus de cœur depuis trop longtemps. Pas que je n’ai pas voulu recoller les morceaux, j’ai essayé. Mais à trop mettre de scotch tape tout croche, j’ai pété un plomb un soir et j’ai tout écrasé moi-même à la masse, j’en ai fait de la poudre, je l’ai laissée au vent de la Berge-des-Milles-Îles, la fois où j’ai embrassé une fille pour la première fois, et que je me suis trompé d’autobus lors du retour. Un jour, si ça t’intéresse, et si je me sens prêt, je te raconterai. La portion d’invention, et de vérité.

J’aurais pas dû prendre du Pepsi à 2h30…

4 janv - Think about you

J’ai pensé à nous deux. Ce que ça donnerait. Encore. J’essaie de penser uniquement aux bons moments, à ceux où tu as souris en même temps que moi. Les mauvais, j’essaie de les laisser au placard, en espérant qu’ils se décomposent comme un corps mort. Je n’ai pas de photo de toi, mais ça m’importe peu. J’ai des images de toi plein la tête, on dirait les affiches qu’on colle sur les panneaux dans la rue, avec les plis, et des affiches qui s’empilent par dessus, qui essaient de faire oublier les évènements passés, et qui, malgré tout, restent collées. Maintenant, le premier souvenir qui me revient en pensant à nous, c’est sur le sofa, à la lueur d’une faible lumière, à côté du piano, ma tête sur tes genoux. Le spaghetti que tu n’as pas fait collé. Mon disque de Coltrane qui jouait «Everytime We Say Goodbye», et je t’ai prise dans mes bras, danser un slow, le premier et le dernier que j’aie jamais dansé.

Les nuits d’été, mon corps en sueur par dessus les couvertures. Les matins avec les griffes d’Edgar sur mes orteils. Le disque de Damien Rice qui te faisait pleurer, celui de Bran Van que je t’ai acheté. La rupture que je repoussais sans cesse, «Now’s not the right time. Attendons après le Pow Wow…» Tu m’as pris de court, en citant Forest, du Loup. «L’illusion de ce bonheur n’est-il seulement que l’habitude?» Et moi qui a pleuré toute la nuit, maudissant Allen et sa Barcelone de t’avoir mis cette idée en tête. On s’est quitté, on s’est disputé, on a baisé, on s’est détruit, et cette nuit-là, à des kilomètres de nous, à quelques mètres de ta collègue newly-wedded, je t’ai fait écouter Duet Tacet, ta tête sur mon abdomen, we started to kiss. De toutes le fois, je crois encore que c’était la plus honnête. Tu savais que je n’avais qu’une blonde un peu cruche en tête. But we did it anyway. Et c’est ce qui a fonctionné. Sans amour, c’était plus simple ainsi. Mais ce soir, dans ton appartement, sur ton ordinateur, j’ose écrire une fois encore… Que serions-nous, aujourd’hui, si nous étions encore «nous»?

Sans le physique, sans les autres, sans tes amis ni les miens (je n’en ai plus, de toute façon), sans le stress de l’école, sans ton boulot, sans mon écriture… Si on effaçait tout, retirer chaque affiche sur la rue pour ne laisser que la nôtre, couper les plis à l’exacto, donner une nouvelle couche de vernis. Would you believe this is real? I’m asking you, because I know… I know you’ll never read this. Parce que j’ai peur que ta réponse soit positive. J’aime penser que je suis le seul à rêver. Que j’étais le seul à te respecter comme tu le mérites, à jouer le grand frère avec ta petite sœur, à blaguer avec ton père et partager une bière à ses côtés. Tu dors… J’en profite pour te piquer la dernière Boris. Et partir comme un voleur, sans faire d’erreur. No love messages this time. But I’ll admit, I like you, kid.

2 janv - Les enfants gourmands

«There’s nothing to do, But I don’t mind when I’m with you.»

Je sais. Je devrais dormir, j’ai travail demain. Mais tu sais ce qu’une sieste fait. J’ai besoin de sortir un paquet de trucs qui me trottent en tête. Comme la phrase Les enfants sont gourmands. Ils passent la main dans un sac de chips, se coupent l’appétit avant le souper. Je le sais, c’est encore ce que je fais. Je me gâche le souper, celui que tu as préparé, en me gavant de petites chips, pensant rigoler un peu avant les trucs sérieux. Mais voilà, j’ai l’estomac noué, maintenant. Et je risque de manquer le souper. Et je réalise que ça crée un malaise dans la famille. Ouais je sais, je fais le pitre et ça ne fait plus rire les enfants. Peut-être que je deviens papa. Oui, je sais, les paroles, les paroles. C’est bien beau. Mais ce sont les actions qui comptent. La prochaine fois, je préparerai le souper. Et quand bien même qu’un enfant gourmand plongerait la main dans les chips avant le repas, je sais que je l’aurai cherché.

La première chose que j’ai faite, dans la maison vide, était de regarder ce vidéo de cet enfant, carotte entre les dents toutes neuves, repousser les avances d’une fille. «Fais pas ton gêné, Jean, pis donne un beau câlin à Amélie.» Noël 1991. En vingt ans, l’histoire fait un tour d’horloge, les deux aiguilles reviennent enlignées. Un autre vidéo, dans la cour de ma grand-mère Auger, sur les genoux de mon père à envoyer un poing dans sa main. «Tu veux dire au revoir à grand-maman? …Tu veux partir tout de suite? Tu dis pas au revoir?…» Fuck. L’histoire ne change pas. En écoutant en boucle Suburban War, avec ce passage en boucle, ma petite main dans sa paume, la maison de grand-maman à Laval-des-Rapides, c’était les rapides sous mes yeux fatigués. Pendant cinq bonnes minutes, dans la maison vide, la tête de Bruce sur mon torse, j’ai pleuré en silence, de peur de déranger. Parce que j’ai toujours l’impression de déranger. D’être de trop, de créer des malaises, de tout faire croche, alors je préfère me tirer avant de trop en faire, ou pas assez. But I don’t mind when I’m alone with you. Seul avec toi, parce qu’à trois, la magie ne passe pas, on dirait, comme une tension invisible dans ma tête. Peut-être qu’elle n’existe pas, j’ai peur de tout, je ne sais pas. J’imagine des engueulades si je fais un move de trop devant d’autres personnes. La vérité c’est que je suis une personne pas forcément solitaire, mais profondément triste. Pendant un moment. Puis c’est l’euphorie totale. Pendant un moment. Mais sans masque aucun, je crois être une personne viscéralement plongé dans le chagrin, constamment tourmenté par des moments ou des gestes du passé qui ne devraient plus avoir d’importance. …Je repense à mon enfance. J’ai tout eu, la santé, les études, les amis. Mais je n’arrive pas à essuyer les blessures, que j’ai subies, mais surtout celles que j’ai fait subir, mon caractère impossible à tolérer, les amours, les trahisons.

Je sais que l’amas de peinture dans le visage m’empêche de vous apparaître comme une personne réelle. Mais sans les masques, tout revient en mémoire. Personne ne veut d’un type constamment visité par ses fantômes, qui déprime l’audience à coup de «J’avoue, j’en ai bavé, pas vous, mon amour». Sans les masques, je n’arrive pas à oublier, à vouloir te faire rire, voire même moins ambitieux, te faire sou-rire. Et ne pas voir ton sourire, ça me fuck l’estomac, plus que de manquer le repas. Laisse-moi un seul masque, celui avec le smile, juste pour passer la soirée. Je fondrai plus tard, dans la voiture, dans l’autobus, peu importe. non, je ne suis pas heureux. Mais laisse-moi te faire croire que tout va bien. Par amitié, ne perds pas ton sourire, pas pour moi.

29 déc - Neighborhood I, II, III

I: la guitare du père à Jay (27 décembre)

Tout a commencé avec Jay. On jouait à cache-cache dans son sous-sol, dans la chambre des machines. Une guitare électrique, rouge, abandonnée. «C’est à toi? Ton père? Il en joue pu? Pourquoi, est super belle…» Je me foutais d’être trouvé, je voulais gratter les cordes, sortir des mélodies. Mais j’ai toujours eu des doigts en pouce, Jay m’a dit que j’étais mieux de taper. J’ai pris une baguette chinoise du souper, commencé un petit rythme sur le chauffe-eau. On commençait à écouter Bloodhoung Gang, même si on ne comprenait pas les calls vraiment dirts. On se trouvait hot, quand on réussissait à faire une toune complète. On gueulait «Suck it!» sans savoir trop ce que ça voulait dire. Puis, mon frère m’a initié à Millencolin. On voulait faire du punk. Jay a dit non, je suis resté derrière mon premier set de drum. J’ai demandé une guitare pour mes 12 ans. C’était la seule chose qui m’aurait fermé la gueule pour entrer dans une école aussi répugnante que Brébeuf. J’attendais d’être dans le parc du Petit Prince le soir pour en jouer, en été, loin des bums qui fumaient de la drogue ou je ne sais quoi. J’ai commencé à écrire sur eux, qu’ils me foutaient la trouille, qu’ils m’inspiraient. J’avais peur, qu’on me frappe, qu’on me pique, ou qu’on pique ma guitare. Mais une fille m’a approché. J’ai tenté de la repousser, je me suis mis devant ma guitare et pas le contraire. Elle m’a demandé de jouer Wish You Were Here. Je connaissais pas, alors elle m’a sifflé l’air. «We’re just two lost souls, vas-y avec l’air, moi j’vais chanter… We’re just.. non, un peu plus bas, ouais là.» J’ai voulu faire entendre du Floyd à Jay, mais lui préférait Blink… J’ai demandé à mon frère de m’accompagner. Lui, préférait la basse. In the neighborhood, I was playing the goddamn guitar, and I think of the smell of her hair, she was getting drunk, pressed her shoulder against mine, getting drunk for her. J’ai découvert Disturbed, Craddle of Filth, et trop tard, Arcade… Putain qu’elle a joué souvent dans ma chambre, Neighborhood #3. Des fois, c’était seulement à la batterie. Ensuite, les Doors, le jazz, les solos de Take Five ou Blue Rondo.

Pendant cinq ans, je restais dans le parc de mon école primaire pour jouer avec les bums, à essayer de durcir ma carapace, ne pas laisser paraître les années du moi souffre douleur. À découvrir Green Day, The Ramones, Black Sabbath, Metalica, trouver des riffs, la nuit, dans mon lit, tromper le sommeil avec des mélodies que je n’aurais pas pu leur faire entendre. Jay a déménagé, la fille punk est partie aussi, et ma copine qui préférait les Destiny’s Child, les Aiguilera, pour ne plus m’écouter rejouer pour la centième fois Something In The Way. C’était loin d’être la plus dure à jouer, mais elle avait quelque chose dans le ventre, cette estie de toune. «It’s okay to eat fish, cause they, don’t have any feelings…» And I can still hear the scent of your hair on my shoulder, girl, but I saved that kiss for another, a later story. Je ne lui tenais plus la main, on ne s’aimait pas, on jouait aux cons, et puis de toute façon, on n’a jamais baisé, rien ne nous a scellé. Quand elle s’est enfuie de moi, j’ai juré que plus jamais, la vie à choisir entre les filles et la guitare. Les filles du quartier, elles sonnaient toutes phonie. J’ai lu Catcher in the Rye, je traitais tout le monde de phony. Je me suis fait mettre dehors du cégep. Et puis, c’était Leloup. En l’écoutant, je n’avais plus envie de jouer. Plus jamais, la musique. J’essayais de jammer comme lui, mais je faisais honte à l’instrument, je l’ai senti. Personne ne peut jouer de guitare sans se sentir soi-même phony, après Johnny Guitar. Alors j’ai mise ma guitare au rencart, dans la chambre abandonnée du frère. J’ai troqué l’instrument contre une machine à écrire. Et malgré les cigarettes qui nous séparent, ton odeur, ta chaleur ne m’a pas quitté. I still live in the neighborhood. You still do. J’ai envie de jouer Summertime. Retrouver les parcs, jouer un riff de Marvin Gaye, «I know flowers grow from rain, But how can Love grow from Pain!» Tu m’as saoulé, miss Robinson. Did you try to seduce me?

II: les éclopés (28 décembre)

Phil got his thumbs chopped off, at the factory, last day of work. Ce matin-là, il avait été malade. Vomi, dans la corbeille, en allant chez Jay. Il a été assez généreux pour lui offrir son lit, le laisser se reposer, mais après seulement quatre heures de faux sommeil, il s’est senti obligé de retourner au boulot. C’était supposément son dernier quart de travail, c’aurait été trop bête de manquer un morceau de salaire avant de partir dans la vieille capitale avec son copain de toujours. Mais voilà. Il a manqué d’attention trois secondes, le temps de s’endormir et de se réveiller en sursaut, et la machine lui a scié le putain de pouce. C’est le deuxième éclopé du voisinage. L’autre, c’est l’un des deux jumeaux de la dame d’en face, une vieille qui ne sort pas souvent. Lui aussi, c’est à la shop qu’il s’est coupé. Au poignet droit. Dans le quartier, ça jase, entre les matantes. «Les pauvres… Si jeunes, et déjà ruinés…»

My brother once tried to gut me, but instead, all he got was my nutsack. Damn was I crying like a madman. J’ai encore la cicatrice. Je crois. J’ai arrêté de vérifier à premiers ébats amoureux. J’avais peur que ça déchire, à nouveau. Une fois la peur passée, j’ai arrêté de vérifier. Pour me venger, j’avais lancé mon chat déjà vieux à l’époque, j’étais tout petit, avec toutes ses griffes dans le visage de mon frère, à sa grande surprise. C’est de là que viennent ses cicatrices au visage. Mon père, c’est une autre histoire. Le voisin, complètement saoul, s’est pointé dans notre cour en lui gueulant après. «C’TU TOÉ QUI VEUT BAISER A’C MA FEMME? AMÈNE-TOÉ, CALISSE!» Il est sorti juste pour essayer de le calmer. Il s’est pris un coup de baseball bat sur le crâne. D’où sa mâchoire difforme. Elle aussi laide que ma mère, sa femme, en plus… J’ai jamais compris d’où il avait sorti cette illusion. People are crazy bastards, I guess.

The neighborhood is filled with dumb fucks. J’avais un pote, au primaire. Sam. Ses parents étaient témoins de Jéhovah. Jamais su ce que ça voulait dire, avant le secondaire, soit quatre ou cinq ans avant son déménagement, dans le fond de Rawdon. Chez lui, on ne fêtait jamais les anniversaires, ni Noël ou Halloween. Je l’enviais. Mes fêtes finissaient toujours au désastre. J’ai jeté le gâteau par terre, à mes quatre ans, parce que mon père m’a pris en photo contre mon gré. Dumb fuck I was too. À six ans, I bitch-slapped ma meilleure amie parce qu’elle m’a offert le cadeau le plus honnête ever. Un sac de billes, dont une, gigantesque. A smasher, we used to call it. Moi je voulais des Batman, des Power Rangers. La pauvre. Je la dénigrais parce qu’elle avait un bec de lièvre. Mais c’était la seule qui m’avait donné un bisou. Dans sa chambre de fille, avec son fauteuil de princesse Disney, en minou rose. I should’ve married that girl. Boy was she sweet. The neighborhood was full of sweet people too. Mais on était tous paumés, des vrais connards. Des gens comme dans Young Adult de Jason Reitman. On avait tout pour être heureux dans une banlieue crade, mais chacun ses blessures de guerre, des doigts en moins, parfois des poings, sur la gueule, et une queue atrophiée. Ma première copine est partie juste à temps. Je n’ai jamais eu le malheur de lui montrer le désastre. La seconde, elle avait son lot de cicatrices aussi, d’un autre quartier. Elle n’a rien dit, n’a jamais eu peur. Ou sinon, elle vomissait en silence, en retrait. We’re all freaks.

III: les lieux (29 décembre)

On allait aux arcades, aux Galeries Laval. C’était avant qu’ils rayent tout de la carte pour installer les bureaux de Tecnic. La plus populaire, la plus high tech, c’était le simulateur de vol en sphère. Jay et son père tripait à se faire virer dans tous les sens, attachés de tout bord tout côté, tandis que moi, je jouais seul au air hockey. Une fois par deux ou trois mois, on se ramassait dix ou quinze dollars et on ruinait tout à l’Arcade 2000. C’était après la fermeture du Centre 2000, sur Daniel Johnson. Le Centre 2000, avec ses grandes allées vides, où circulaient les balles de tumbleweed, tellement c’était vide. La mauvaise herbe s’installait à l’entrée du cinéma Odéon, là où j’ai eu mon baptême du cinéma, avec Casper, le premier. Puis, c’était Titanic. Le Centre 2000, avec sa machine à gomme géante et ses gommes T-rex, disparues depuis; avec son Dollorama, les figurines de Dragon Ball qu’on collectionnait. We hung out at such dorky places, with the neighborhood… Mais on était bien entouré. La première gardienne dont je me souviens, elle était blonde, avec une couette, et m’aidait à faire mon casse-tête Babar, ou Passe-Partout, avant que ça disparaisse des écrans. Elle est venue seulement une fois, mais je me rappelle encore. Mon premier crush. La deuxième personne qui m’a gardé, avec mon frère, c’était Fred. Fred, qui habitait au coin de la rue, qui jouait aux épées avec nous, au jeu de serpents et échelles, et qui nous a initiés à l’humour de Pauly Shore dans l’armée. Lui est resté plus longtemps, mais paraît qu’il était souvent sous les drogues et tout, et quand ça s’est su… You know, parents’ stuff. «On va vous trouver quelqu’un de mieux.» Chez Jay, il ne sortait pas souvent, et comme on était copains, ça aidait à rester chez eux sans qu’on pleure l’absence de papa maman. Kids’ stuff.

We went to the same places, always, like swimming lessons, tennis courses, the games, the pool. This one time I went for my swimming exam, I was maybe seven or eight, playing with my Batman toys, left it there, pass the exam, like a boss, eyes full of goddamn chloral, getting out of there, leaving Batman behind… Kid cried for a year for his goddamn Batman toy. Never found the bastard. Il y avait cette fille, Marie-Chantale. J’ai toujours eu la mémoire courte, et en plus, avec un prénom composé. Alors je l’appelais «Eille». Un jour, elle s’est tannée. «J’m’appelle pas Eille. J’ai un nom.» Smart kid she was. Elle était mignonne, mais ce n’était qu’une amie de la piscine. Une fille dans le coin de Sainte-Rose. Une fois, j’ai dû attendre ma mère chez elle, on a joué à Duck Hunt au Nintendo. C’était la dernière fois que je l’ai vue. De ce temps-là.

You never really leave the neighborhood. Sometimes, you just meet old people you once knew. Like this girl. Boy did it felt weird when I saw her, last season, in a McDonald’s parking lot. You know, when you want to say hi, but then it’d be awkward as hell, so you just kind of shut up, and look at what they’ve become on Facebook. We still do kid’s stuff. I still search those T-Rex gums. My old Batman action figure… But the Arcade is still down in history. So is the supermall…

«Please… Let me keep this one memory. Just this one.»

-Eternal Sunshine of the Spotless Mind.