dimanche 28 novembre 2010

Lettre pour M.C.

C'est bientôt Noël. J'écoute pour une trentième fois mes cassettes de Brian Eno, Spoon et Boards of Canada... Je veux avoir le feeling parfait pour la cassette mix que je veux te donner. Pas trop de cafard, question que tu puisse passer au travers de l'hiver, mais juste assez pour que tu continue de penser à moi. J'ai fait les dernières retouches à mon roman; j'espère qu'il sera accepté chez Barnes and Nobles. Ça fait quand même deux ans que je travaille là-dessus. Quand tu l'enverras, assure-toi d'avoir assez de timbres; la poste, des fois, ils sont pointilleux. Tu m'excuseras, j'ai pas fait trop de dépenses. Je voulais économiser pour toi. T'en auras assez pour voyager où tu le souhaite. Tu peux emmener qui tu veux, mais s'il te plaît, ne dis pas d'où ça vient. Ça peut t'éviter bien des problèmes. Enfin...
D'un côté, j'ai peur de faire une gaffe; et pourtant, de l'autre côté, j'ai l'impression de te faire une faveur. Tu ne dois pas m'en vouloir. Ces choses-là arrivent tous les jours. Quand tu voudras penser à moi, vas sur la colline et arrache quelques brins d'herbe, en écoutant ma cassette. Personne ne pourra te déranger, c'est sécuritaire et serein.

Désolé de briser ton noël. Prends soin de toi.


samedi 20 novembre 2010

Tu disais

Musique pour lire le texte
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Je t'écrivais des histoires. T'as dit, un soir qu'on jasait sur le net: "Écris-moi une histoire. Divertis-moi." Tu faisais un devoir de français, et on avait 14-15 ans. Te souviens-tu notre deuxième sortie? On était assis près de la fontaine Saint-Louis, et un itinérant est passé pour me dire de te dire: "T'as de beaux yeux, tu sais?" Et ta tête sur mon épaule, on en revenait toujours pas du film qu'on venait de voir. Souvent, tu disais: "C'est compliqué. J'te raconterai, un jour." C'était l'été où mes parents devaient fêter leur vingtième anniversaire de mariage, et tout avait dégénéré. Je voulais fuguer. Alors, t'as envoyé Étienne me chercher. "Je pouvais pas me rendre. Tu le sais." C'était la première marque d'affection que tu m'as démontrée. Ça et les histoires qu'on écrivait ensemble.

Des fois, ça t'arrivait de m'appeler "mon ange". Mais ça te faisait pleurer, tu préférais rester distante. Comme si depuis le début, tu savais que t'allais me briser, un jour ou l'autre. Tu m'avais même demandé plein de trucs sur moi, avant qu'on se voit pour la première fois. "C'est pour un poème. Je sais, c'est quétaine. Tu me rends quétaine", tu disais. Quand on s'est rencontré pour la première fois, tu m'as fais écouter Hide and Seek de Imogen Heap. Le lendemain, je suis revenu avec le cd déjà tout consommé pour te l'offrir, te remercier de la découverte. En arrivant au métro, on s'est embrassé pour la première fois. Et tu pleurais.

À la rentrée des classes de ma deuxième année de cégep, tu venais d'arriver en ville. J'avais fumé un gros pétard avec Bob après avoir calé de la tequila. Et toute la soirée, tu t'es inquiétée pour moi et ma face verte. "T'as pas l'air bien... Veux-tu que j'appelle un taxi? T'as vraiment pas l'air de filer." Cette fois-là, c'est moi qui pleurait. Je voulais t'éviter cette image de moi, complètement fini, la tête écrasée entre les genoux. J'aurais préféré me souvenir de notre premier rendez-vous. "Il faut que j'me trouve une robe, pour ma fête. Connais-tu le Valet de Cœur?" Je n'avais jamais vraiment visité Montréal. Tu m'as trainé sur tout le Mont-Royal, et j'en revenais simplement pas comment tu pouvais avoir un aussi beau visage. Et que tu puisse apprécier ma présence. Tu m'as même amené dans un sex shop. Juste pour rigoler.

On a passé une soirée d'hiver à chercher un bar, en faisant semblant qu'on était des amoureux pour une nuit. "J'connais un raccourci, viens", tu m'as dit avec un petit sourire naïf. On a marché pendant près d'une heure avant de réaliser qu'on était revenus au point de départ. J'avais la mâchoire gelée, mais on a rit pendant que je réchauffais mon menton avec la chandelle qui était sur notre table, au St-Ciboire.

Je t'avais trainé à la Cinémathèque, un jour. "C'est le film des Daft Punk, dans une semaine. J'veux être sûr d'avoir mon ticket." Tu connaissais pas, alors je t'ai fait entendre leur best of, parce que c'est tout ce que j'avais, à ce moment-là. Pour t'impressionner, j'ai écouté tous les albums de Pink Floyd en une nuit. Le lendemain, tu partais en voyage autour du globe. Je voulais te garder pour moi. "T'es tellement selfish, des fois, j'me d'mande pourquoi je t'aime" ça t'arrivait de dire. T'avais frustré parce que je t'avais corrigé sur la date de sortie de l'album Animals que t'avais confondu avec celle de The Wall. J'ai rêvé à toi des centaines et des milliers de fois. As-tu déjà rêvé à moi?

Pendant un moment, t'habitais l'appartement de ta tante partie en voyage. J'ai mis du jazz et on a dansé un slow pendant que ton spaghetti sauce cuisait lentement. "J'aime pas le jazz d'habitude. Mais ça, c'est pas mauvais." Tu disais: "Les trompettes, c'est un instrument joyeux. C'est fait pour le ska, pas pour être triste." Alors tu pleurais. Mais on était pas triste. Les matins, chez toi, c'était ton chat qui nous réveillait à coups de griffes sur les orteils, sous la couverture. "Yé pas méchant. Juste jaloux." Et tu souriais, alors on s'embrassait.


On s'est perdu de vue, on fréquentait différentes écoles, alors on faisait semblant d'être des old-school qui s'écrivent des lettres. L'avant-dernière, ou l'autre d'avant, tu m'as écrit: "C'est compliqué. Ma sœur m'a dit que l'amour, c'est autant physique que psychologique. Si je peux pas te sentir, si je peux pas me coller contre toi, c'est comme si yavait rien. Je t'aime, mon ange, mais c'est compliqué. Je suis désolée." Sur la feuille mobile pliée en origami comme toi seule le faisait, j'y retrouve encore des petits cercles où l'encre a déteint. Tu disais: "Si seulement... Mais tu comprends... C'est pu possible." Te souviens-tu de cette soirée où ta sœur avait organisé un défilé de mode? Un vieux, dehors, avait gueuler du haut de son balcon et je lui avait rendu son cri. Et tu m'as dit: "T'es ben con!" avec le gros sourire dans la face. "T'as pas de classe; j'te sortirai pu jamais. Tu m'entends? Pu 'amais!" Et le lendemain, on se saoulait la gueule au St-Sulpice, parce que c'est toujours là qu'on finissait, quand on allait en ville.

Mais t'étais rendue loin, t'avais switché de carrière, tu voyageais, tu changeais. "Toi, tu changeras pas... Grow up esti, tu vas pas rester un bébé gâté pour le reste de ta vie." Tu devenais froide. Dans les moments gris, entre deux longs silences au téléphone, tu m'engueulais. Alors, je prenais des antidépresseurs. Je ne voulais pas pleurer. Je voulais que tes paroles s'envolent, comme si tu ne m'avais jamais détesté. La dernière lettre que j'ai reçu de toi, il y avait juste un cd compilation, sans titre ni rien. Juste des chansons où des types sont tristes et parlent d'amour et tout. J'ai lu Salinger, et je me suis mis à boire fréquemment. Tu m'as effacé de ta vie, comme un mauvais souvenir.


Alors je mets tes mots entre guillemets, parce qu'en les mettant en cage comme un oiseau, j'ai l'impression qu'ils m'appartiennent pour toujours. Alors que je sais qu'ils ne prennent leur vraie beauté que lorsqu'ils sont en liberté, dans ta bouche.

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JD
samedi soir, 20 novembre 2010, minuit 36

This



How I hate this... this... thingy.

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Je ne veux pas élaborer... je pourrais dire trop de conneries...
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8 octobre 2011, 19h15

Fuck la non-élaboration. À soir, je vais dire ce qui marche pas là-dedans. Le gars (con, insouciant, mal propre, sans mémoire, awkward, etc) est constamment stalked par une chix normale (Lisa) et s'en balance complètement. Déjà, j'en ai les couilles bleues. Mais en plus, il sort avec la top poule de luxe (Envy), et finit par s'en lasser... NON MAIS! Ce mec est au summum de l'idiotie, fait toujours des gaffes, se fout de tout, et il réussit quand même à être populaire auprès des cuties? Fuck, j'veux dire, c'est n'importe quoi... En plus qu'il s'emmerde? Avec ces filles à son cou?
C't'une vraie joke, crisse. Fuck toi, Scott. Fuck toi.

Oui, je suis jaloux d'une personnage fictif. Mais quand c'est hors de la réalité à ce point-là, moi j'me fâche. Bordel... Come on. À quand verra-t-on un personnage physiquement correct, sans être top shape comme Durden, et voir les filles passer devant lui sans rien faire parce qu'il a honte d'on ne sait pas quoi? À quand un alter ego de ma trempe? :( ...

lundi 15 novembre 2010

Nocturne Kaléidoscope

Rivières fruitées, les fêtards endimanchés, les journées longues de printemps, tout est en suspend. Dans l'oeil du cyclone, le vent rafale tempête et seccoue. L'air alcolisé se fracasse contre mon cerveau de gelée agrume. Visages difformes à travers ma fumée piaillent enfants gâtés et insouciance lointaine. Comme je vous envie, rougeur cerise, vos caresses, rires éclatant. Dans ma grotte, les ombres vont nonchalantes, cachotières. Une paume sur paume, les baisers vont et viennent, troublent mes yeux charbonniers. Rivières de louanges, des fruits mesquins. Sur les parois granules et boue, jouent mes doigts un portrait de vous.
Recule, efface, recommence.


Pierre sur pierre, la craie perce et blanchie sur pierre polie. Le trait plus clair, plus sombre, moins écatombe. Gorge souple et salive sans rancune. Frappe. Frappe. Frappe. TapTapTap la dactylo, car les écrits restent. TapTap, recule, déchire, et marche. Coeurs de verre, coeurs centenaires, et fleurs plastiques pour les romantiques. Kaleidoscope difforme, multicolore, mais indolore. Essaim d'enfantillages malsains. Noir goudron ma vue et mes poumons. Les klaxons, les sifflets, les messieurs en habit bleu. Vous me donnez raison. Fuir la réalité, abri tempo mal installé, le vent coulant entre les fentes. Y'en a partout, j'vais finir noyé...


L'automne, vous avez froid, vous oubliez le petit moi, et c'est caresse après caresse. RonRon les amoureux sont cons. Vampire social, vos histoires me nourrissent, en concassant la matière, réduis en cendre toute illusion de bonheur. Rêveur de petit pré, cageôleur de grotte emmitouflée, couverture de rocaille sablonneuse. Alinéa 3, voir le flâneur de Beaudelaire: carnet de poche, stylo de ringard, chaussures de minables, tête à ne pas recommander. Fam: rôdeur, voyeur. Petit piano, je note note note, gros bémol, ça ne sonne pas. Petit scribe de peu d'ambition.


Pourquoi tu n'es pas là, me tenir tête, me faire rire, petite cambrioleuse de souvenirs. Gourmande d'offre, toujours en demande, mais jamais disponible. La portée du Cyclope ne se rend pas jusqu'à toi. Et j'ai essayé, encore et encore. J'ai frappé ma grotte des levrès qui te ressemblent, j'ai inscrit ta voix sur mille papiers, mais Polyphème, tes moutons partent toujours sans donner de nouvelles. Nos mots n'aboutissent pas. Tout ça n'est que nocturne kaléidoscope, étrange mélange confit de bruits napalmes, faible hérisson qui s'hiro-chimère. Mes mirroirs, jeune et vieux, mince et laid, je garde une langue amère. Pourquoi tu n'es pas moi. Exactement comme moi.


TapTapTap, sur la machine clic clic, sur l'assomante portative qui BipBip PopUp. Dring dring sans réponse Dings dongs jého-J'viens pas, et autres buzz fantôme de cellphone. Coups de ça-va-ça-vient entre les reins qui vient pas, encore drelin drelin, mais pas de Merlin, juste des tics, des tics-tacs, du tac-au-tac, l'horloge clignote chuchotte debout, penchée sur mon souffle court, mon sommeil qui ne vient plus. Vroum, screech, uhn-tiss uhn-tiss, ça va passer, c'est pas moi. Plongent les écouteurs limaces au fond de ma carcasse, vibre mon thorax, mon gros égo de sans coeur, de pince sans pleur. Glousse, ma poule; smile, you're on camera. Voyeur et activités solitude avec tissus, t'es qu'une poubelle. Même si, pendant un instant, t'es assez jolie pour être elle. Plus proche portrait que mes dessins abstraits, ma pierre cassée, ma tête fragment de moi. Mon canon, aggressif, impulsif, ci-gît devant ma silhouette. FapFapFap, et frappe frappe frappe tes draps, ton matelas. Clic clic pop Up, scroll down, mes discussions avec toi. Pourquoi t'es pas moi.


Iglou, iglou, iglou, je ne suis pas des vôtres. Je cherche encore, ma main gratte-coco fume, sifflote, caresse l'air chaud de la fan. Iglou, iglou, je suis mieux que vous autres. Mes rivières, soupière banana-fish, murmurent une photo, profile une belle fille. Et tu baignes tes pieds, ma marmitte à papiers, et tu n'en sors pas. Tu souris, puis faibli. Ne reste plus que de la limaille de rêve. Vitamine carrencée, je préfère en rester là, plutôt que de manquer de toi. Glouglou, les poules pas de tête, c'est plus séduisant pour l'ampoule ébrêchée que je suis. Glouglou, ça rit, ça chante, ça loufoque et ça pleure pas sur tout t'es rien. Ça boit à tout terrien, sur tout terrain, ça vous en bouche un trou, plein la gueule les sans dessein. Bien mal aimé qui ne rigole point. Alors je bois, je frivole l'alcool, les détritus pharmaceutiques, anarchaïque, et schizophrène. Tempête dans ma flûte, tout reflexore mes gestes et mes mirroirs, fracas de vitre en poison. Turbine de lave, rocher percé de la membrane bien pensante. Fissure et déconfiture au fond de ma cave, partout s'envole mes calepins, perdu dans une marre de y'en a marre. Foudre violette sur mon oeil cyclone, l'orage ruine-babine, les marées montantes. Ma noyade de toi. Ma haine de toi et lui. Je robinsonnerai à des milles de toi, en wilsonnant dans mon kaléidoscope nocture.



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Lundi, 15 novembre 2010, minuit 50
Jean Derome

dimanche 14 novembre 2010

Moi pis ma gueule

On arrête pas de parler. Dommage que ça tombe sur les nerfs de trop de personnes.
J'aime parler.
Et eux ne font que me dire: "Calisse. Tu la ferme jamais hein..."
Alors que je voudrais les entendre dire: ".... shh, ta yeule, Jean parle. :) "

Je vous hais. Même si je connais le problème de l'extérieur. J'ai la même maladie que ma mère, que le reste de sa famille. Et si, oui souvent, j'ai envie de leur dire "Tu la farme jamais, hein", je reste là à les écouter, avec un petit sourire sur le bord des lèvres.
Pourquoi?

Parce que ça coute rien.
Parce que ça fait plaisir à quelqu'un.
Parce que ça ne l'emprisonne pas dans la solitude.
Parce que ça prouve que tu peux être autre chose que narcissique.

Jack: When people think you're dying, they really, really listen to you, instead of just...
Marla: - instead of just waiting for their turn to speak?

Yeah... that's it.

Faut-il que je fasse semblant d'être mourrant pour qu'on m'écoute divaguer et faire semblant d'aimer ça?

....jme perd dans mes idées