samedi 15 octobre 2011

15 oct - Analyse de "Snoopy's Reunion"



Parce c'est une émission qui m'a particulièrement marqué, plus que n'importe quel autre programme, et pour multiples raisons.

Famille
Du côté de ma mère, il y a toujours eu des rassemblements de la famille immédiate, les enfants et petits-enfants de mes grands-parents. En quelque sorte, ça nous empêchait de sombrer dans le mal de vivre, l'ennui mortel. Et c'est ce que vit Snoopy, en étant aussi longtemps séparé de ses frères et sœurs. Mais avant même de vivre plus d'un an avec Charlie Brown, la séquence où sont récupérés chaque chiots dans la Daisy Hill Farm nous montre déjà à quel point il est dur de voir partir les siens vers une autre vie. La musique n'est plus la même si la guitare n'est plus en harmonie avec les violons et la batterie. Cette image de la musique en famille n'est pas qu'une tradition états-unienne, mais aussi profondément québécoise. Dans les maisons de Sacré-cœur, à Gaspé, au Mont St-Hilaire, partout, les oncles et les tantes jouaient du violon, faisaient sonner l'accordéon, si ce n'était pas de la cuillère, puis chanter et danser. Aujourd'hui, on peut se compter chanceux si on a un cousin qui joue de la guitare autour du feu... On est plutôt rendu avec nos iPods qui jouent du heavy metal, du hip-hop, et de l'électro. Bref, la famille divisée. Mais revenons à nos mout... nos chiens! La famille des beagles, une fois divisée, semble vivre normalement, soit une vie de banlieue, ou dans le fond du Texas, mais la solitude reste présente, enfouie. L'idée de la réunion devient non seulement une bonne nouvelle, c'est aussi un extase pour chacun des membres! Si quelques uns avaient délaissé la musique, ils la reprennent en un clin d’œil, avec autant d'ardeur et de joie que dans la ferme, à leur plus jeune époque. Et même malgré la destruction de ce lieu mythique, la musique mélancolique se transforme en fête. Parce qu'au fond, ils n'ont besoin de rien d'autre que la famille.

Nostalgie
Qu'en est-il de ce lieu mythique? Pourquoi lui donnerais-je cette appellation? Cette ferme est le berceau de ces petits chiens. La représentation du foyer uni originel, de la mère aimante, toujours là, mais aussi de la séparation, d'un univers nouveau auxquels ils sont destinés. Si ce n'était qu'une ferme en campagne qui serait toujours en place au moment de la réunion, il n'y aurait aucune évolution, autant physique que mentale. On y représente l'industrialisation du monde qui nous entoure, le départ vers les grandes villes pour "aboutir à quelque chose", mais aussi un symbole qu'on ne peut pas revenir en arrière. Le passé est fait, ainsi soit-il. Le seul qui a pu retourner à la ferme après la séparation, c'est Snoopy, et tout ce qu'il y a trouvé n'était qu'une maison vide, où même la mère ne semble plus vivre... Personnellement, j'y ai vu la maison de mes grands-parents, après la mort de mon grand-père. Toute la famille avait alors quitté la région, et un visite à cette maison n'était qu'une grande maison où il n'y aurait plus de fête... L'image de ce retour aux sources y est donc représentée sans aucune exagération, pile sur la plaie qu'il faut savoir gérer, traverser.

Dépersonnalisation
Le premier à être parti, à avoir une seconde mère aimante (la jeune fille blonde) puis une nouvelle maison. Snoopy a alors tout d'un chien normal: assis, rapporte, parle, il fait tout sans aucune volonté d'être extravagant. Et pourtant... L'appartement où souhaite déménager la mère de la jeune fille interdit l'hébergement d'animaux, et cette jeune blonde se voit le cœur brisé l'obligation d'expliquer à son chien qu'ils doivent le retourner dans son ancienne maison. On y aurait vu de la joie dans ce retour et l'effet de séparation n'aurait alors aucune importance. Mais elle en a. Snoopy a lui aussi le cœur brisé de se séparer à nouveau d'une représentation de la mère où se trouvait confort et amour sincère. Et cette tristesse est soulignée davantage avec la ferme complètement désertée de ses frères et sœurs, et où la mère, je le répète, semble aussi absente. Ce qui était d'abord un chiot joueur, musicien, ainsi que dressé et joyeux, s'est ensuite lentement transformé en petit chien apeuré, seul, et qui n'a qu'un cruchon, symbole de son frère le plus... "musclé" (Olaf) pour le protéger de la suite des évènements. Comment peut-on réagir, ou même comprendre, enfant, à une telle séparation? "You're a good puppy and I love you very much" revient presque à la situation du divorce lorsque les parents expliquent à l'enfant que ce n'est pas de sa faute. Et à l'époque (1991), dieu sait qu'il y en a eu des enfants du divorce. Et comme tous les autres épisodes de Peanuts, le sentiment est rendu avec une telle justesse, sans cri ni blessure autre que morale, qu'on ne peut s'empêcher de ressentir la tristesse honnête des deux partis. Voyons la scène:



Mais que devient Snoopy face à cette seconde mère qui l'abandonne? Il semble avoir perdu l'idée qu'il pouvait se faire du bonheur avec un autre, se cache, avant d'être repris par un petit garçon qui ne souhaite rien d'autre qu'avoir un chien pour l'accueillir chez lui, jouer à la balle, voire devenir son meilleur ami. Or ce qu'il trouve en lui, c'est un être qui a peut-être souffert de cette normalité perdue avec la jeune blonde, préférant oublier cette époque merveilleuse de l'enfance pour ne plus souffrir, et donc devenir (si on veut) un adulte. Ou plutôt un adolescent. Il ne dort pas dans sa chambre, s'assied dans un Lazy-boy au lieu d'être sur ses quatre pattes, prépare un discours au lieu de faire "ouaf ouaf", joue au baseball, fait de la luge, du surf... Bref, sa naïveté, son obéissance, son bonheur simple, tout cela s'est transformé en un amalgame de cynisme, de rébellion assumée et d'extravagance qui, au premier coup d’œil, semble lui rendre une certaine joie. Snoopy, en ne retournant pas à une époque mentale précédente, peut être enfin heureux. On dirait bien un cas de refoulement, ici! Après un an et demi, le malaise revient; l'ennui de quoi, d'on ne sait quoi. Ah oui, la famille! Mais comme j'en ai déjà parlé, on n'y retournera pas en profondeur. Simplement mentionner que les retrouvailles lui rendent un bonheur éloigné qui finalement n'est pas qu'un retour aux sources, comme l'indique les symptômes de la nostalgie, mais qu'il est aussi possible de vivre quelque chose de nouveau avec cette famille. Comme quoi, elle ne représente plus le passé, mais le présent.

L'influence personnelle
Probablement mon premier contact avec la musique blue-grass, country. La steel-guitar, les violons, un cruchon, pour tout orchestrer dans un mélodie qui fait danser, taper du pied. Si j'ai pu nier cet amour de la musique traditionnelle pendant mon enfance, cet amour lointain m'a sûrement aidé à apprécier davantage les chansons de Patsy Cline, Catherine Durand, Cat Power et autres Sons Of The Pioneers, sans qui je ne saurais pas non plus apprécier la sincérité des goûts de MC Gilles. Vous pouvez dire ce qui vous chante, la musique traditionnelle va chercher les roots en nous, celle de l'époque des grands-parents de nos parents.
Et puis que dire du sentiment de mélancolie mêlé à la nostalgie par rapport à cette maison abandonnée de la famille... Chaque année, lorsque nous passons par Montmagny, c'est une visite essentielle et qui pourtant ça ne sert à rien, comme tourner le fer dans la plaie, se remémorer de bons souvenirs qui jamais ne reviendront comme avant, qu'il faut profiter du moment présent, et ne pas se lamenter sur le passé... Devenir cynique. Oublier la première petite fille que j'ai connue, la deuxième aussi, pour ne pas avoir mal pour rien... Et profiter des jolies filles qui seront toujours là :)

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JD, samedi 15 octobre 2011, 15h

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