On se promenait en patin à roues alignées, l’été, juste dans la rue, et pendant que l’un attachait ses protège coudes, l’autre s’asseyait sur la bande du trottoir pour regarder le soleil se lover derrière une flotte de nuage d’abord gris, puis ocre, pour finir rouge violet mauve sombre, et ça restait ainsi jusqu’au lever, quand on mangeait des tranches de pain, rôties et coupées en quatre pour y colorier du Nutella, du miel, des fraises confites, et du beurre d’arachide, puis glisser les mains sur le robinet sur le côté de la maison, remplir nos fusils à eau et élaborer des plans de commando, en s’infiltrant chez les voisins, le soir tombé, parce qu’on prétendait aussi devenir des ninjas invisibles et que rien ne nous arrêterait jamais, comme n’importe quel enfant de huit ans, mais certains restent plus discrets et préfèrent le bord du trottoir et faire sauter une super balle rebondissant jusqu’au milieu de la rue, où les voitures passent mais pas tant, juste un peu, et on n’avait jamais peur, à cet âge-là, de se faire frapper, parce que c’était peu connu comme coin, et qu’on était la première génération à grandir dans ce quartier. Des fois, une tante pas trop éloignée venait une semaine avant nos fêtes parce qu’elle s’était trompée de date, mais on pouvait quand même jouer avec nos cousins pendant un après-midi, courser jusqu’au bout de la rue, pisser sur l’arbre du vieux, qui habite encore là quinze ans plus tard, déballer des cadeaux assez banals, mais assez sympas pour jouer un après-midi avec les cousins et le nouveau jouet, et on finissait par souper ensemble sur la véranda en arrière avant de construire des forts dans le salon avec les coussins du sofa puis les voir quitter dans une Jetta 89 bleu poudre, mais pas le même modèle que celle de nos parents, et les voisins prenaient la relève en engueulant le grand frère qui avait brisé la pompe à eau des voisins durant un commando et souvent, ça finissait en pleurs, mais rien ne durait vraiment longtemps, à cet âge-là on oubliait vite, et le lendemain les dessins animés ou les Power Rangers jouaient assez fort pour passer à autre chose, avant que la petite voisine d’en face sur qui on avait un œil n’offre un sac de billes en guise de cadeau officiel d’anniversaire et qu’on pique une crise parce que ce qu’on voulait, c’était la nouvelle figurine de Batman, ou n’importe quelle autre cochonnerie de gamin gâté.
On peut penser qu'avec du recul, ça peut passer, mais ça passe jamais, parce que si ça a cassé en quelque part, c'est parce que c'était pas fait pour être recollé.
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