Musique: Erik Satie, Trois Gymnopédies.
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La télévision passe un programme sur les ondes courtes. Le son est bas. Lasse, Natalie ferme le poste. Le ciel est bas, l'humidité pèse sur le quartier de Laval-des-Rapides. Dans le 4 et demi, Claude et Natalie sont quelque peu distants. L'une observe le vent cogner à la fenêtre, l'autre lit son journal, la tête posée sur sa main gauche. Les nuages rendent sa lecture plus difficile d'ailleurs, mais il ne sent pas le besoin d'allumer le globe au dessus de sa tête pour autant. Arrivé aux annonces d'emploi, Claude touche du bout des doigts son stylo sur la table. S'ils avaient eu un chat, il serait sorti du salon pour aller sur la galerie, puis reviendrait sur ses pas aussitôt, annonçant quelques gouttelettes passagères. Seulement, il n'y a personne d'autre que Claude et sa copine. Au loin, on peut entendre de faibles cris, les enfants des voisins, une voiture qui passe. Et c'est le silence. Le stylo ne patine plus sur le journal depuis plusieurs jours.
Natalie tourne la tête vers Claude, perdu dans ses lignes de vie, sans savoir que sa tête divague vers d'autres horizons, l'esprit léger.
-Would you marry me?
Sorti de ses pensées, Claude relève le menton, ses yeux suivent patiemment. Les deux se regardent, sans évoquer aucune émotion, ni tension, ni passion. À moitié dans sa bulle, Claude réfléchit à la question comme s'il s'agissait d'une offre d'emploi à considérer avec minutie.
-You mean, like, now?
Sa copine ne répond pas sur le champ; elle préfèrerait se coucher dedans... ce qui l'incite à continuer.
-Je sais pas... Oui, probablement.
-I mean... sooner or later, it doesn't matter. Not to me. I just wanted to know if we could... work together. As married people, you know?
Natalie baisse la tête, se mordille le côté du pouce, rongée par le malaise d'avoir posé une question pareille. "I'm sorry. Nevermind."
-No, don't be.
Son regard revient sur ses océans d'offres et de demandes avant de fermer le journal. Les mains collées entre elles sous la table, la mine basse, Claude affiche un subtile sourire. Il lui retourne la question.
-Would you, Natalie Schmidt, marry me, Claude Robitaille?
Son ton laisse passer une pointe d'incrédulité, et s'en apercevant rapidement, il ne regrette pas sa question. Elle pose un regard doux sur son visage perplexe.
-Yes. Sure. Why not.
La faible pluie cesse de pianoter sur la porte de la galerie, remplacée par un vent frais qui circule par la fenêtre de la chambre à coucher. Seul le sifflement habite la demeure. Claude se lève puis s'installe près de Natalie.
-Tu le ferais vraiment?
-Yeah... Comme je le dise, why not. Je va pas go away comme le wind... I mean, I'm not that kind of girl. And... I like you...
Ses yeux fixent ses genoux puis le vide avant de trouver les yeux de Claude. Toutes paupières closes, les deux posent leur tête sur celle de l'autre. Leurs doigts s'enserpentent et se gardent au chaud.
-I like you too, Nat.
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J'aurais peut-être dû continuer en cinéma... beaucoup de regard, de gestes subtiles, une petite musique, peu de parole...
Faites attention, en passant. Ce texte ne traite pas d'amour! Hein. Qu'on ne se méprenne pas, là. They like each other. Like c'est pas comme love, hein. C'est une réflexion, point barre, presque à la manière de Robert Bresson (sans émotion). C'est pas non plus de la grosse déprime: il ne pleut pas à boire debout, il fait gris, c'est tout.
JD
20h12, vendredi 28 octobre 2010
vendredi 29 octobre 2010
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i like it a lot... et le choix de musique est tres apprécier.
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