dimanche 1 août 2010

Joies et peines d'un franco-canadien (30 juillet 2010)

Cela fait plus d'un an que je ne suis sorti avec personne. Ou plutôt, un an et demi, mais bon, peu importe. Le fait est que je ne sais plus comment ça marche, les premiers pas. Depuis plusieurs mois, je ne rêve que de ça: le moment où je suis officiellement en couple. La joie et l'excitation d'être enfin dans les bras d'une jeune dame affectueuse et seine d'esprit. J'aimerais pouvoir recommencer à l'infini cette expérience de premier contact, en sautant bien évidemment tous les jours de futilités, de routine, d'acquisition. Car évidement, tout finit par la possession: l'autre est notre conjoint, et ça ne changera pas. L'ennui mortel.



Cette fois, c'est différent. Anny est colombienne. Elle a le teint basané, sa langue natale est l'anglais, et elle, à défaut de toutes les autres feignasses à qui j'ai pu rêver, elle semble bien m'aimer pour qui je suis, même si je suis un peu abruti par moment. Avec elle, on peut ne pas savoir s'il faut parler en anglais pour qu'elle comprenne, ou parler normalement et ainsi se faire apprécier pour qui l'on est. Il faut faire attention; dans le premier cas, elle se sent mal. Le fait de s'adapter à elle alors qu'elle est en terrain francophone, c'est un peu désolant, selon ses dires. Tout de même, Anny ne mâche pas ses mots. En me déposant chez elle, dans sa voiture, elle me fait remarquer: "Tu vois, je t'ai laissé de l'espace pour la marche. Comme ça, tu ne seras pas... "pogné", you know". Une petite pointe, déjà. Le message est reçu: le couple est formé et elle me fait déjà la morale. Qu'importe, aujourd'hui, c'est jour de gloire et je suis enfin revenu dans les sentiers du bonheur.



Elle me dit: je nous aime bien, toi et moi. Mais je ne me conte plus d'histoire. Elle me dit: ne t'oblige pas pour moi. Mais je me sens bien dans ses bras. Elle me dit: tu me fais rire. Et je pense que c'est pour en finir. Elle me dit: ok, you're weird. Je fais la sourde oreille et prétends qu'elle est folle de moi. Je lui parle des lunes qui bondent le ciel d'onze heure le soir, je fais le poète un peu niais, et je me plais à penser que nous sommes ensemble pour un bon bout de temps.



Son appartement est un peu tassé, mais coloré. Je m'installe et attend son retour. Elle est partie se doucher ou je ne sais quoi. Jusqu'à cet instant, je ne me doute toujours pas que la dernière fois que je l'ai vue, c'était sur le pas de sa porte d'entrée. Elle a disparu à jamais.



Et je me réveille.

Je me dis: pourtant, ça semblait si différent des autres fois. Elle devait penser que je rêve trop souvent aux filles. Je me dis: elle n'en vaut pas la peine, ce n'est qu'une des rares qui arrivent de nulle part et continue sa route ailleurs. Elle a dû se douter qu'elle était la première à me donner un effet de réalisme. Je me dis: celle-là m'acceptait malgré ma douce folie. Mais elle devait plutôt se foutre de ma gueule.



Ben maintenant c'est fini, et je t'oublierai, toi et ton accent. Je te remplacerai tous les soirs.



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Jean

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